Menacé de censure par la gauche comme l’extrême droite, Michel Barnier a confirmé qu’il aurait « probablement », « assurément », recours au 49.3 pour faire adopter le budget et tenter de réduire le déficit inédit du pays. Tout en dévoilant quelques ajustements.
Électricité
« L’électricité va baisser de 9 % et on va voir si on peut faire plus pour préserver le pouvoir d’achat des Français », a affirmé le Premier ministre. Compte tenu de l’évolution des marchés, à la baisse depuis plusieurs mois, le gouvernement a prévu de remonter une taxe sur l’électricité, ramenée à son minimum pendant la crise de l’énergie. Gain de cette opération de rattrapage : 3 milliards d’euros. Plus 3 milliards supplémentaires si la taxe était remontée au-delà de son niveau d’avant-crise.
Mais Michel Barnier a laissé entendre sur le plateau de Gilles Bouleau qu’il pourrait décider de mettre le curseur un peu moins haut, se passer de quelques millions d’euros pour les caisses de l’État, et accorder ainsi une baisse supplémentaire des tarifs de l’électricité au 1er février. De quoi convaincre Marine Le Pen, prête à appuyer sur le bouton de la censure, qui jugeait « inadmissible » l’augmentation des taxes sur l’électricité ?
Train de vie de l’État
Concernant les dépenses afférentes au fonctionnement du gouvernement et de certaines administrations, le Premier ministre a là aussi promis quelques coupes : « J’essaie d’apporter des réponses calmes, sereines, objectives. Nous allons faire 4 milliards sur le fonctionnement des ministères, 4 milliards sur les agences de l’État, nous allons économiser sur le train de vie de l’État. »
Renseignement pris auprès de son entourage, ce dernier a précisé les choses et les chiffres. Il s’agirait plutôt de « 2 milliards d’euros sur les agences de l’État et 2 milliards sur l’aide publique », nous indique son cabinet.
« Nous pouvons être plus sobres, notamment en demandant aux anciens Premiers ministres des efforts », a-t-il encore affirmé. Son équipe confirme également sur ce point qu’une réflexion est bien menée pour réduire certaines prises en charge dont bénéficient les onze anciens Premiers ministres encore en vie, ainsi qu’un certain nombre d’anciens membres du gouvernement.
Michel Barnier reprend ainsi à son compte une suggestion faite dans un rapport budgétaire spécial publié vendredi dernier par la députée (LR) du Jura Marie-Christine Dalloz.
Retraites
C’est à n’en pas douter l’un des dossiers les plus complexes pour le gouvernement. Les pensions de retraite devaient être indexées sur l’inflation. Pour réaliser des économies, il avait été prévu de geler cette indexation pendant six mois, jusqu’au mois de juillet 2025. Puis de réindexer à 1,8 %.
Mais Laurent Wauquiez, patron des députés Droite républicaine, s’est invité le 11 novembre au même JT de 20 heures de TF1 pour dévoiler le compromis trouvé avec le Premier ministre Michel Barnier, soit une revalorisation à 0,9 % de toutes les pensions dès le 1er janvier 2025, avant un second rattrapage de 1,8 % pour les plus modestes en juillet.
Ce mardi soir, ce ne sont pas les chiffres qu’a donnés Michel Barnier : « Sur les retraités, on va indexer dès le 1er janvier toutes les retraites, de 0,8 puis de 1,6. Ceux qui ont des petites retraites seront protégés. » Interrogé, son cabinet apporte des précisions sur les chiffrages : « La construction du budget était sur 1,8 % (d’inflation), nous a-t-on répondu. La banque de France table plutôt sur 1,5 %. Et les évolutions récentes de l’inflation nous font penser qu’on sera plutôt à 1,6 %. D’où ce taux retenu pour la revalorisation des retraites inférieures au niveau du smic. » Ce sera donc moins que prévu.
Dette
« Nous empruntons déjà très haut nos taux d’intérêt, les taux d’intérêt que nous sommes obligés de respecter pour financer notre dette avec des investisseurs chinois ou américains, a encore alerté Michel Barnier à ce même 20 heures de TF1. Ils sont actuellement presque au niveau de la Grèce. »
Il y a en effet péril en la demeure. La différence entre les taux d’emprunt de la France et de l’Allemagne atteint en effet désormais 86 points de base (0,86 %). Une première depuis 2012. Cette différence sert en quelque sorte de baromètre de la santé financière de la France.
Pourquoi une telle dégradation de ce taux ? Les investisseurs craignent un rejet du budget et la chute du gouvernement. D’où le subtil glissement sémantique lâché par le Premier ministre, qui parle désormais d’un déficit « autour de 5 % ». Comme s’il n’était lui-même plus vraiment certain d’atteindre les 5 % de déficit en 2025, une limite fixée par Bruxelles pour les pays membres de l’UE.