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Sur les réseaux sociaux, les agri-influenceurs cajolent bétail et followers


Pauline Garcia, éleveuse dans le Cantal, se photographie avec une de ses vaches, le 14 février 2024.

« A votre avis, les vaches sont-elles racistes ? » Pauline Garcia, éleveuse dans le Cantal, pose avec humour la question à ses abonnés sur YouTube. Derrière cette jeune femme dynamique qui est aussi comportementaliste animalière, on voit une vache noir et blanc s’agiter d’un air inquiet dans la paille, comme pour dire non. Hélas, pour les amoureux des animaux, la réponse est oui. Enfin, plus exactement, elles sont « robistes » : elles ont tendance à rejeter celles qui n’ont pas la même couleur de robe qu’elles. Mais qu’on se rassure : Pauline Garcia explique que cette xénophobie bovine peut être corrigée si on habitue la vache, dès son plus jeune âge, à côtoyer des congénères de couleurs différentes.

Dans une autre publication, cette fois sur Instagram, elle explique qu’elle préfère se mettre devant ses vaches et les inviter à la suivre, plutôt que de les pousser par-derrière comme le font traditionnellement les éleveurs. Derrière cette méthode, une conception inspirante du leadership : « Le leader, c’est celui vers qui le troupeau a envie d’aller naturellement, sans être contraint : c’est ce qui assied son autorité. »

Un fonctionnement qui rappelle celui des réseaux sociaux, où la légitimité de l’influenceur lui est conférée par ceux qui le suivent. Pauline connaît bien le sujet : elle admet passer entre deux heures et deux heures et demie environ par jour sur Facebook, Instagram, YouTube et TikTok. Grâce à elle et ses confrères, c’est un public très large, souvent citadin, qui a découvert le monde de la ferme.

« Etienne Agri Youtubeurre »

Quitte à occasionner des dérives, comme récemment le phénomène des vaches de compagnie. « A force de voir des photos de vaches sur les réseaux et de trouver ça trop mignon, certains adoptent des vaches comme animaux de compagnie », explique Pauline Garcia. Une démarche qui ne prend pas toujours en compte le bien-être de l’animal. « J’ai été choquée par une femme qui postait des vidéos où elle faisait des tresses à sa vache et lui mettait des rubans dans les cheveux. Un animal de ferme, ça n’est pas une poupée Barbie ! » Tout le monde n’a pas, en effet, un sens inné du management : « Si on ne sait pas la gérer, la vache peut vite devenir insupportable ! »

Selon une enquête réalisée en 2020 par Hyltel-Datagri pour Terre-net et La France agricole, deux agriculteurs sur trois seraient actifs sur les réseaux sociaux. Un tournant dans un monde traditionnellement réputé pour sa discrétion. La crise qui secoue le secteur agricole n’y est pas pour rien. Communiquer, c’est, pour beaucoup d’éleveurs, une manière de changer le regard du grand public sur leur métier. Etienne Fourmont, appelé sur les réseaux « Etienne Agri Youtubeurre », exploite un élevage de vaches laitières dans la Sarthe. Avec ses 120 000 abonnés sur YouTube, il fait figure de star dans le monde des « agri-influenceurs ». En janvier, il est allé manifester pendant deux jours avec ses confrères. Pour lui, la présence sur les réseaux sociaux s’inscrit dans la continuité de l’action sur le terrain : il rappelle que la crise qui frappe les éleveurs est aussi psychologique qu’économique.

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