En 2022, Reconquête ! avait 2,5 millions d’électeurs, une centaine de milliers d’adhérents, beaucoup d’espoirs et de cerveaux à la tâche, mais un seul élu. Deux ans plus tard, la « Zemmourie » a perdu 90 % de ses électeurs, des adhérents et des cadres sont dans la nature, et elle a toujours un seul élu : Sarah Knafo, peut-être la dernière de son camp à garder de hautes ambitions.
« On a subi une énorme tempête, mais nous ne sommes pas morts, veut croire la récente députée européenne, sortie de son rôle de conseillère de l’ombre. On reste une boussole idéologique. On va maintenant tenter de créer une alternative à ce qui ne marche pas. » A savoir : le Rassemblement national (RN), qui reste la Némésis du couple Zemmour-Knafo. « Le RN est dans une impasse, le récit de leur victoire est terminé. »
Sarah Knafo pourra en discuter, dans les couloirs du Parlement européen, avec quelques-uns des trente eurodéputés du RN, qui contrôlent le troisième groupe de l’hémicycle. Elle a été abandonnée par les quatre autres eurodéputés élus sous l’étiquette Reconquête !, le 9 juin (5,4 % des voix), à l’issue d’une campagne européenne fratricide en interne, conclue par un vaudeville de soixante-douze heures avec trahisons et portes qui claquent. Sarah Knafo a perdu et Marion Maréchal n’a pas gagné.
Comme annoncé avant le scrutin, la nièce de Marine Le Pen siège dans le groupe des Conservateurs et réformistes européens (ECR) de Giorgia Meloni, la présidente du conseil italien, avec Nicolas Bay et Guillaume Peltier, autres experts en changements de maison, et la conservatrice Laurence Trochu. Mme Knafo, de son côté, a trouvé refuge dans le groupe le plus sulfureux des extrêmes droites européennes, sobrement nommé « Europe des nations souveraines » et dominé par le parti allemand AfD, l’ancien allié du RN.
L’ambition de Sarah Knafo
Cette association de parias de l’extrême droite européenne ne tient déjà qu’à un fil. Les collaborateurs du Parlement européen hésitent à s’y engager tant sa durée de vie est jugée incertaine. Sarah Knafo se réjouit toutefois que les députés les plus suspects d’antisémitisme aient été exclus du groupe, à la demande de l’AfD, et qu’elle en ait été nommée vice-présidente, avec une dotation généreuse pour employer sept collaborateurs. De quoi rémunérer quelques militants, alors que le parti repose sur de rares épaules et a perdu 1,35 million d’euros de dotation annuelle après les élections législatives.
Le bureau exécutif de Reconquête ! ne se réunit plus faute de combattants, après le départ de Mme Maréchal, M. Bay et M. Peltier, les trois vice-présidents. Stanislas Rigault, resté fidèle au couple Zemmour-Knafo, malgré la tentation de rejoindre le RN, pose un regard désabusé sur l’utilité du mouvement : « Reconquête ! s’appuyait sur deux constats : Marine Le Pen ne pouvait pas gagner et le RN ne faisait pas l’union des droites. Ces deux points sont un peu moins d’actualité, même s’ils ne sont pas allés au bout [du rassemblement] », constate-t-il.
Il vous reste 54.24% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.