April 1, 2025
Politics

Rougeole : « On doit faire une médecine basée sur les preuves », l’appel du ministre français de la Santé à son homologue américain


Une prise de parole forte à l’heure où la moindre voix critique recueille une volée de bois vert. Alors que la rougeole connaît un rebond dans plusieurs pays, dont la France, en état de « vigilance renforcée » depuis le 20 mars, le ministre de la Santé Yannick Neuder a pris la parole samedi pour inciter à la vaccination, tout en critiquant son homologue américain.

« La France, les communautés médicales et scientifiques ont un rôle important de rappeler que la vaccination protège et que c’est l’absence de vaccination qui tue », a insisté le ministre lors d’une visite à l’hôpital de Voiron (Isère), qui a jugé « un peu fou d’être obligé de redire ça au pays de Pasteur ». Aux États-Unis, où la rougeole était considérée comme éradiquée en 2000, des centaines de cas se sont récemment déclarés, avec les premiers décès depuis une dizaine d’années.

Évoquant le futur G7, que présidera la France, et le G20 qui se tiendra aux États-Unis, Yannick Neuder a prévenu qu’« il y aura des discussions importantes de lutte contre l’obscurantisme avec le ministre de la Santé Kennedy, qui remet en cause l’intérêt de la vaccination ». « C’est mon rôle de ministre de la Santé accompagné des sociétés savantes (…) de dire qu’il faut se vacciner », « on doit faire une médecine basée sur les preuves », a-t-il martelé.

Un éminent médecin de la FDA démissionne

Vendredi, le Dr Peter Marks, responsable de longue date des vaccins à la Food and Drug Administration américaine, a présenté sa démission et fustigé la position antivax du secrétaire à la Santé Robert F. Kennedy Jr. « Il est clair que le secrétaire ne souhaite ni vérité ni transparence, mais plutôt confirmation servile de ses fausses informations et de ses mensonges », a écrit le scientifique à la commissaire par intérim de la FDA, Sara Brenner.

S’il a quitté son poste sous la pression, Peter Marks écrit qu’« un poids m’a été enlevé, car j’étais dans un environnement où la situation s’enfonçait de plus en plus dans le danger ». La veille, le ministre américain de la Santé, opposé aux vaccins, avait annoncé son intention de créer « en priorité » une agence pour évaluer les « dommages » causés par les vaccins au sein des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies. Cette agence doit, selon lui, contribuer à apporter une « science de référence » au gouvernement fédéral.

Ses variations de position ont conduit samedi une commission de la Chambre des représentants, au Congrès, chargée de la surveillance et de la réforme gouvernementale, à adresser à Kennedy Jr. une liste de requêtes sur des actions « mettant en danger la santé publique du pays en compromettant les vaccinations de routine ».

Dans le comté de Gaines, au Texas, où sévit la rougeole, les préconisations alternatives de RFK Jr de prendre de l’huile de foie de morue ou de la vitamine A pour lutter contre la rougeole ont fait florès. Des dizaines de malades, pour la plupart des enfants non vaccinés, ont dû être hospitalisés. Les communautés évangélistes opposées à la vaccination trouvent dans le discours du ministre un soutien de poids, au grand désarroi des médecins, débordés et inquiets.

Le rebond de la rougeole concerne de nombreux autres pays, sur fond de vaccination insuffisante. Aux États-Unis, entre le 1er janvier et le 27 mars, 483 cas confirmés de rougeole ont été signalés dans 20 États (contre 285 pour toute l’année 2024), selon les statistiques officielles. Seuls 3 % des patients avaient reçu une à deux doses de vaccin.

En Europe, selon des chiffres publiés mi-mars par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le nombre de cas a doublé en 2024, à plus de 128 000 et 38 décès. En France, des chiffres ont été récemment publiés : « Du 1er janvier au 14 mars 2025, 180 cas de rougeole ont été déclarés, contre 83 sur la même période en 2024 » en France, rapportait le 20 mars dernier Santé publique France. Près de la moitié ont été hospitalisés et un sur cinq a connu des complications, dont une encéphalite. Plus d’un tiers des cas (35 %) a frappé des enfants de moins de 4 ans.

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