December 23, 2024
Politics

Budget 2025 : l’Assemblée rejette la surtaxe sur les grandes entreprises


Difficile pour le gouvernement de s’y retrouver dans le débat budgétaire. Le projet de loi de finances 2025 (PLF) a été, vendredi, largement alourdi ou amputé de pans entiers, parfois même à l’initiative de sa propre majorité relative à l’Assemblée. Point d’orgue d’une journée à rebondissement sur cette partie « recettes » du PLF : les soutiens du gouvernement ont voté avec le RN et les députés ciottistes pour supprimer l’article sur la surtaxe temporaire des grandes entreprises.

Cette « contribution exceptionnelle sur les bénéfices de grandes entreprises » était, en principe, destinée à abonder les 60 milliards d’économies que le gouvernement espère réaliser avec son budget 2025. Elle devait être instaurée pendant deux ans, et rapporter huit milliards d’euros en 2025 et quatre milliards en 2026.

Selon l’exécutif, elle devrait toucher autour de 450 entreprises. Mais un amendement de la gauche contre l’avis du gouvernement est venu brouiller les cartes. Il relève le taux de prélèvement sur la première année, afin de le porter à 40 % pour les entreprises dont le chiffre d’affaires va d’un milliard d’euros à moins de trois milliards d’euros et à 55 % pour celles dont le chiffre d’affaires est supérieur ou égal à trois milliards. Immédiatement, Olivier Faure, premier secrétaire du PS, a salué « une victoire idéologique de la gauche ».

Un surcoût de 13 milliards pour les entreprises

« Cet amendement va ponctionner nos entreprises à près de 13 milliards d’euros en plus de ce qui est fait. Aucune de ces entreprises ne resterait sur notre territoire », a dénoncé le ministre du Budget Laurent Saint-Martin après son adoption.

« Vous dites qu’il est insupportable de demander cet effort sur les entreprises qui ont accumulé des milliards de bénéfices que vous avez défiscalisés, je vais vous dire, c’est irresponsable de demander aux salariés de ce pays deux ans de plus de leur vie à travailler », a rétorqué le président LFI de la commission des Finances Éric Coquerel.

De son côté, le socialiste Philippe Brun a lui dénoncé des « allégations mensongères » sur la portée de l’amendement et rejeté les accusations d’une mesure « confiscatoire », qui n’aurait été que « temporaire pour une seule année ».

« C’est plus une loi de finances mais une entreprise de démolition », a estimé a contrario le député Droite républicaine (ex-LR) Philippe Juvin. Comme le reste de la coalition gouvernementale (EPR, Horizons, MoDem, DR), les députés du Rassemblement national et ceux du groupe UDR d’Éric Ciotti ont voté pour rejeter in fine l’article dans sa globalité, le retirant ainsi du texte.

Toutefois, la copie pourra encore évoluer lors de la navette parlementaire avec le Sénat ou via un 49.3.

Moins de crédits pour l’Europe

Autre grand huit. Les députés ont fini par supprimer l’enveloppe de prélèvement de l’État dédiée à l’Union européenne (environ 23 milliards d’euros), après un coup réussi par le RN. Le groupe de Marine Le Pen a arraché un amendement rabotant de 5 milliards d’euros ces crédits.

Pris de court, le reste de l’Assemblée s’est divisé : la gauche et quelques centristes ont finalement fait rejeter l’article, tandis que les macronistes se sont pour la plupart abstenus. Tout cela sur fond de polémique dans l’hémicycle, le RN accusant l’écologiste Sandrine Rousseau d’avoir fait un bras d’honneur. Celle-ci a reconnu avoir « entamé » le geste et présenté ses « excuses ».

La hausse du tarif de l’électricité rejetée

Les oppositions ont aussi supprimé d’autres articles, comme celui prévoyant une réforme du tarif préférentiel d’accès à l’électricité nucléaire, dit Arenh, qui disparaîtra fin 2025. Avec une confortable majorité face à une quarantaine de députés soutenant le gouvernement. « Personne ne se sent respecté par le Premier ministre donc personne ne fait d’effort », constate un collaborateur parlementaire au groupe macroniste EPR. « C’est la perspective du 49.3 qui démotive les troupes », regrette un député membre de la coalition.

En effet, avec 1 932 amendements encore au programme, et un examen qui doit théoriquement s’achever samedi soir avant un vote solennel prévu mardi, l’Assemblée semble se diriger vers une impasse calendaire. Le gouvernement pourrait recourir au 49.3 pour passer sans vote et réécrire le texte, mais aussi renvoyer la suite de l’examen à début novembre. Ce qui rapprocherait les débats d’une barre des 40 jours au terme desquels le texte passerait directement au Sénat.

Il pourrait aussi tenter d’aller au vote, un rejet pouvant également permettre d’envoyer la copie initiale au Sénat. « Je veux laisser le débat se poursuivre », a redit vendredi Michel Barnier.

Quant à Emmanuel Macron, il s’est publiquement agacé à l’Élysée des hausses d’impôts, et « qu’on règle les problèmes de déficit public en revenant totalement sur une cohérence de politique macroéconomique », dans une pique au gouvernement et sur fond de dégradation de la perspective française par l’agence de notation Moody’s. Le gouvernement a aussi connu un revers sur son budget de la Sécurité sociale, rejeté à l’unanimité en commission, avant d’arriver dans l’hémicycle lundi.

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