La commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale a rejeté mardi la proposition de loi visant à durcir les conditions de maintien dans un logement social, après suppression, à l’initiative des députés de gauche, de toute la substance du texte.
Le texte, déposé par l’ancien ministre du Logement Guillaume Kasbarian (Ensemble pour la République, groupe macroniste), propose de durcir les conditions permettant de rester dans un logement social, en renforçant notamment l’examen des revenus des locataires, et en instaurant un contrôle du patrimoine des bénéficiaires. Il prévoit d’abaisser les seuils de revenu à partir desquels un bailleur social peut demander à un locataire de quitter un logement.
L’objectif est une meilleure « justice sociale », selon le rapporteur du texte, le député apparenté EPR Stéphane Vojetta, qui estime à près de 30 000 le nombre de logements sociaux pouvant être libérés. Concrètement, « un salarié qui vit à Saint-Denis devra quitter son logement social à partir d’un salaire net de 3 800 euros par mois » pendant deux ans, contre 4 336 euros par mois actuellement, a-t-il argumenté.
Le texte propose également d’abaisser le seuil permettant de réclamer au locataire un « surloyer » complémentaire lorsque le total des revenus des habitants dépasse les revenus maximums d’attribution du logement.
Des députés de gauche et du groupe Liot ont fustigé le texte, qui ne répond pas selon eux à la crise, car il ne libérerait que peu de logements. Leurs amendements pour supprimer les articles principaux ont été adoptés, vidant le texte de sa substance. « Le droit au logement social à vie n’existe pas », a lancé Thomas Portes, député LFI de Seine-Saint-Denis, rappelant que des surloyers et mesures d’obligation de quitter un logement social sont déjà prévus.
À l’issue de l’examen, la commission a voté contre la version du texte vidée de sa substance. Il arrivera donc dans sa version initiale le 31 mars dans l’hémicycle.
Passe d’armes entre la gauche et le groupe macroniste
« Le constat c’est que la gauche protège des personnes aisées et propriétaires pour qu’elles restent dans du logement social au détriment de ceux qui en ont vraiment besoin », a réagi Guillaume Kasbarian auprès de l’AFP.
La ministre déléguée à la Ville Juliette Méadel a elle salué sur X le rejet du texte : « Les habitants des quartiers demeurent défavorisés socialement et s’ils vivent un peu mieux tant mieux pour le quartier ! Nous voulons de la mixité sociale, pas des ghettos ».
Je salue le rejet en commission de la PPL Kasbarian qui entendait expulser les locataires des logements sociaux dans les quartiers politique de la ville, lorsqu’ils voyaient leur revenus augmenter.
Les habitants des quartiers demeurent défavorisés socialement et s’ils vivent un…
— Juliette Méadel (@juliettemeadel) March 25, 2025
« Une ministre qui défend le maintien de ménages aisés dans le logement social au détriment de ceux qui en ont besoin (…) qui se réjouit du rejet d’une proposition du socle commun soutenue par Matignon. Assistez aux réunions interministérielles ou démissionnez », a vertement rétorqué Guillaume Kasbarian.
L’Union sociale pour l’habitat, qui représente les bailleurs sociaux, s’était dite « très défavorable » à ce texte et avait proposé des modifications, dont la suppression de l’abaissement du seuil de revenus d’obligation de quitter un logement et des sanctions contre les bailleurs sociaux. Cinq associations de défense des locataires avaient dénoncé dans un communiqué une « instrumentalisation éhontée de quelques situations marginales ».