Ils sont sous pression, ils s’inquiètent des projets environnementaux européens, ils ont les moyens de se faire entendre et comptent bien les utiliser : les grands patrons de quelque soixante-dix entreprises de la chimie et d’autres secteurs énergivores se réunissaient, mardi 20 février, à Anvers (Belgique). La ville portuaire n’avait pas été choisie au hasard pour ce sommet présenté comme « privé » : elle est le premier pôle industriel européen de la chimie et de la pétrochimie, ainsi que le principal émetteur de gaz à effet de serre en Belgique.
C’est, très symboliquement aussi, sur le site de BASF, numéro un mondial de la chimie, que les patrons ont évoqué la nécessité de pérenniser leur activité et, à cette fin, fait connaître leurs doléances à Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, et à Alexander De Croo, le premier ministre belge, dont le pays occupe actuellement la présidente tournante de l’Union européenne.
Des activistes avaient déployé devant le lieu de la réunion des banderoles critiquant les responsables politiques présents et l’« accord secret toxique » qu’ils s’apprêtaient à avaliser. La réunion devait, en effet, déboucher sur l’adoption d’un « European Industrial Deal », qu’il est difficile de ne pas opposer au Green Deal, le Pacte vert élaboré par l’exécutif européen.
Celui-ci enjoint aux industriels d’atteindre la neutralité climatique en 2050, mais ils trouvent dans ce projet des « objectifs politiques contradictoires » dont ils demandent la « clarification ». Essenscia, la fédération qui défend plus de 700 entreprises belges et est membre du lobby Conseil européen de l’industrie chimique (Cefic), juge ainsi qu’il est impossible d’atteindre les objectifs climatiques, environnementaux en préservant la croissance économique et « la prospérité ».
Réglementations contraignantes
Au cours de la réunion, préparée par le Cefic avec la publication d’une très critique « étude d’impact » de la Stratégie pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques, un chapitre du Pacte vert élaboré par la Commission européenne, les nombreux griefs du secteur ont été exprimés à haute voix. Trop de réglementations contraignantes, pas assez de soutien pour un secteur confronté aux aides d’Etat accordées massivement par la Chine et les Etats-Unis à leurs entreprises, incertitudes juridiques croissantes liées à l’octroi de permis environnementaux, etc.
Mme von der Leyen s’est aussi vue rappeler que les subventions accordées à une industrie qui emploie 1,2 million de travailleurs dans l’Union européenne varient fortement d’un pays à l’autre tandis que les différences de prix de l’énergie subsistent largement, ce qui fausse également la concurrence.
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