December 24, 2024
Economy

En Indonésie, « éducation laïque et religieuse se livrent à une intense compétition »


En ces temps de débat sur le rôle et les objectifs des établissements éducatifs à caractère religieux, tels que le collège, catholique, Stanislas, à Paris, ou le lycée, musulman, Averroès, à Lille, et leurs relations avec un Etat laïque, il peut être utile de se tourner vers une autre grande démocratie, l’Indonésie. Dans ce pays de 275 millions d’habitants, dont 230 millions de musulmans, éducation laïque et religieuse se livrent à une intense compétition économique et idéologique avec des conséquences profondes sur son développement politique, culturel et idéologique.

Ce combat opposa la tradition religieuse à la dictature militaire sanglante du président Mohamed Suharto (1921-2008), dictature que servit le lieutenant-général Prabowo Subianto, 72 ans, élu le 14 février à la présidence indonésienne dès le premier tour avec plus de 55 % des voix.

La culture islamique a toujours joué un rôle important dans l’éducation en Indonésie. Les plus vieilles écoles religieuses, les pesantren, presque intégralement dévolues à l’étude religieuse, datent du XVe siècle. Les madrasas, les plus répandues aujourd’hui, apparurent au tout début du XXe siècle en vue de moderniser l’éducation et de contrer l’influence occidentale.

Les madrasas, organisées sur le modèle des écoles laïques, incluent néanmoins une part importante d’études religieuses. Samuel Bazzi, Masyhur Hilmy et Benjamin Marx, les auteurs d’une étude intitulée « Religion, Education, and the State » (« religion, éducation et Etat ») estiment que 26 % de l’instruction dans les madrasas porte sur des sujets religieux, de l’éthique et de la doctrine musulmane à l’apprentissage de l’arabe.

Compétition directe avec le secteur public

En plus de l’apprentissage dans les madrasas, les écoles religieuses organisent aussi des cours du soir sur l’étude du Coran. Ces écoles sont largement financées par des fonds privés, les dons des communautés locales et les frais d’inscription, mais aussi par des donations des pays du golfe Persique dont le montant reste opaque.

L’éducation publique, quant à elle, connut un essor sans précédent dans les années 1970. Plus de 61 000 écoles furent construites sous l’impulsion de Suharto et grâce à la manne financière du premier choc pétrolier. L’objectif de cette expansion, au-delà de garantir à tous un niveau d’éducation primaire, était aussi de contrer l’influence religieuse et d’homogénéiser et de construire la nation indonésienne en offrant une instruction commune en bahasa, la langue vernaculaire, à travers ce gigantesque archipel de 17 000 îles aux 700 langues différentes.

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